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Guifette noire (Chlidonias niger)
Fig. 1 - Mark Zekhuis (Saxifraga)
Fig. 1

Guifette noire, Chlidonias niger (Linné, 1758)

Synonyme : Sterne épouvantail

Classification (Ordre, famille) : Charadriiformes, Sternidés

Description de l’espèce

La Guifette noire est une petite sterne d’eau douce, de taille inférieure à la Sterne pierregarin Sterna hirundo. Comparée aux sternes dites de mer, la silhouette apparaît plus compacte, avec des ailes moins longues et moins étroites. La queue peu fourchue est plus courte.

L’adulte nuptial présente un plumage noir à gris foncé de la tête jusqu’au ventre, limité nettement par le blanc pur des sous-caudales. Le dessus et les ailes sont gris ardoisé, un peu plus foncé au niveau du dos et des grandes primaires. Le dessous des ailes est gris clair, voire presque blanc. Le bec est noir et les pattes rouge noirâtre.

La femelle, souvent très difficile à distinguer est plus claire, avec notamment la gorge gris clair.

L’adulte en hiver possède un plumage identique sur le dessus, mais différent sur les parties inférieures. La tête porte un capuchon noir se prolongeant à la nuque et derrière l’œil contrastant avec le reste blanc. La gorge, la poitrine et le ventre sont également blanc. Une tâche longiligne sombre visible en vol et posé s’étend sur les côtés de la poitrine.

Le juvénile se distingue essentiellement par le dessus gris brun plus ou moins foncé selon les individus. Son plumage est marqué de bordures à pointes pâles donnant un aspect écailleux au dos.

La mue complète des adultes commence dès juin et se prolonge jusqu’au début de l’hiver. Une seconde mue partielle intervient en hiver jusqu’en avril-mai. Chez les jeunes, une mue complète se déroule en hiver et au printemps (GEROUDET, 1999).

Le répertoire vocal de l’espèce se limite en période internuptiale à des cris brefs, nasillards et rêches, émis le plus souvent en vol, ressemblant vaguement à ceux de la Sterne naineSterna albifrons. Dans les colonies de reproduction, les vocalisations sont plus fréquentes. Des simples cris discrets et plaintifs émis près des nids ou lors des nourrissages de poussins, l’ambiance peut se transformer, selon l’importance de la colonie, en véritable concert de cris d’alarmes stridents ou aigres, lancés à la suite de dérangements humains ou en présence de prédateurs (Tous les oiseaux d’Europe, J-C ROCHE, CD 2/plage 85).

Longueur totale du corps : 23 à 30 cm. Poids : 60 à 85 g.

Difficultés d’identification (similitudes)

La Guifette noire ressemble surtout en période internuptiale aux deux autres espèces de guifettes présentes en France : la Guifette leucoptère, Chlidonias leucopterus, rare, uniquement observée en migration et la Guifette moustac Chlidonias hybrida, migratrice et nicheuse localement, commune. Les difficultés de détermination concernent surtout les juvéniles.

Répartition géographique

La Guifette noire est une espèce holarctique, dont la forme nominale Chlidonias n. niger se reproduit en Europe et en Asie jusqu’au Lac Balkhach (Kazakhstan)et à l’Altaï (Sibérie). Sa distribution hivernale est circonscrite à l’Afrique, des côtes de Mauritanie à l’Afrique du Sud.

La sous-espèce surinamensis niche en Amérique du Nord et hiverne du Mexique au nord de l’Amérique du Sud, jusqu’aux côtes péruviennes et guyanaises (DEL HOYO et al., 1996).

En Europe, l’espèce se reproduit dans la majorité des pays, à l’exception des Iles britanniques, de la Belgique, du Portugal, de la Norvège, de la Suisse et de l’Autriche.

En France, la distribution des nicheurs se limite exclusivement à quelques grands marais de la façade atlantique ainsi qu’aux étangs de la Brenne et irrégulièrement en Sologne, en Camargue et dans le Forez (Trotignon, 2006).

L’essentiel de la population se reproduit dans les marais de la Brière et sur le Lac de Grand-Lieu, suivis du Marais Poitevin vendéen et du Marais de Rochefort où les effectifs sont plus réduits (TROTIGNON, 2005).

Au cours des périodes de migration, l’espèce est observée un peu partout dans le pays, mais plus particulièrement sur l’ensemble des côtes, dans la vallée du Rhône et les régions de l’Est.

L’hivernage reste anecdotique en France. Les quartiers d’hiver de la population ouest-européenne se situent sur les côtes occidentales de l’Afrique, notamment dans le Golfe de Guinée (CRAMP et al., 1998).

Ecologie

La Guifette noire fréquente habituellement les étangs, les marais continentaux, les marais arrières-littoraux, mais également en période de migration, les grands cours d’eau, les bords de mer, souvent à plusieurs kilomètres au large des côtes, les lacs, les bassins de retenues d’eau et les stations de lagunage.

Dans les marais de l’Ouest, l’espèce est strictement inféodée à la prairie hygrophile ou mésohygrophile temporairement inondée, généralement soumise au pâturage. Sur les sites intérieurs, elle recherche pour nicher les étangs souvent difficiles d’accès, riches en végétation flottante ou émergée. Elle s’installe aussi depuis plusieurs décennies sur des radeaux flottants et des îlots artificiels placés à sa disposition sur des plans d’eau libre ou encombrés de végétation émergée basse. Dans tous les cas, la Guifette noire fréquente des biotopes aquatiques et subaquatiques ouverts exempts de boisements pionniers (saulaies) et de grands hélophytes couvrant de vastes surfaces (phragmitaies) (MONTFORTin ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999). En Marais Poitevin et Rochefortais, la Guifette noire s’installe surtout dans les prairies naturelles comportant des dépressions (« baisses ») inondées où subsiste une fine lame d’eau de quelques millimètres jusqu’en été. Les dépressions dont le micro-relief laisse apparaître des petites bosses de terre ou de végétation, constituent l’habitat exclusif de reproduction. Cet habitat correspond à l’association végétale du « ranunculo ophioglossifolii – Oenanthetum fistulosae », souvent dominée par l’Eléocharis des marais, Eleocharis palustris (SERIOT, 1996). Dans les marais de la Brière, le faciès des sites de reproduction correspond aux prairies inondables à Glycérie flottante Glyceria fluitans (MONTFORTin ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, op. cit.). Les roselières fauchées sont également fréquentées.

Comportements

Le retour sur les sites de reproduction débute en avril et culmine en mai, le pic de migration se situant dans la première quinzaine de ce mois. Le passage s’estompe rapidement après cette date et laisse quelques oiseaux erratiques non nicheurs jusqu’à fin juin. La Guifette noire, très sociable, se déplace en migration ou effectue des haltes sur des sites favorables en groupes lâches pouvant compter quelques dizaines à plusieurs centaines d’oiseaux, notamment le long des côtes maritimes.

Une grande partie de l’activité diurne est consacrée à la recherche de nourriture. D’un vol incessant et capricieux, la Guifette noire capture ses proies en rasant la surface de l’eau ou en se laissant tomber, mais contrairement aux sternes, elle ne plonge pas. Elle chasse également à plusieurs dizaines de mètres au-dessus des plans d’eau ou des prairies.

Lors de paniques soudaines souvent inexpliquées, les oiseaux se rassemblent d’un vol rapide en essaims compacts. Les activités de confort se passent à terre, sur un piquet ou sur des objets flottants, l’espèce ne se posant qu’exceptionnellement sur l’eau.

Les nicheurs quittent les sites de reproduction à partir de fin juillet-début août, les jeunes partent à la fin de ce mois et en septembre. La migration bat son plein entre le 15 août et le 15 septembre et s’achève rapidement avant début octobre. Quelques oiseaux retardataires peuvent être observés jusqu’à la mi-novembre.

Reproduction et dynamique de population

De retour sur les sites de reproduction, souvent occupés d’année en année, les colonies de Guifette noire se composent en général de 10 à 25 couples, rarement davantage en France. Elles manifestent leur présence par des jeux nuptiaux aériens démonstratifs plus ou moins agressifs. Les oiseaux se poursuivent en groupe très bruyant effectuant des envolées spectaculaires entrecoupées d’offrandes précédées de parades à terre plus discrètes. Chaque couple prend possession d’un petit territoire correspondant à l’emplacement du futur nid où aucun intrus n’est toléré.

Le nid mesurant de 10 à 20 cm de diamètre est de conception variable. Il peut être composé d’un amas important de végétaux plus ou moins dégradés ou d’un simple tapis d’herbe, voire d’aucun matériau. Sa situation varie également selon les sites, il est placé à découvert sur de la végétation flottante (ex. : Nymphae sp.), sur un amas de petits hélophytes (ex. : Eleocharis palustris), sur le sol nu d’une motte de terre ou d’un bourrelet de vase ou bien encore sur le tapis herbacé d’une prairie fraichement pâturée. Exceptionnellement, des nids sans aucun apport de matériau, ont été établis sur des bouses de vache desséchées dans une prairie méso-hygrophile à Carex divisa (CAUPENNE, 1991).

Les nids sont espacés d’au moins 60 à 80 cm, plus fréquemment de 2 à 4 m.

Une seule ponte est produite par an, comptant en général 3 œufs (extrêmes : 1 à 4). Elle débute après le 15 mai et se poursuit jusqu’aux premiers jours de juillet dans les cas de pontes de remplacement. L’incubation, assurée surtout par la femelle, dure 20 à 22 jours. Les poussins semi-nidifuges peuvent s’éloigner du nid pour se dissimuler à partir de leur quatrième jour. Au bout de 22-25 jours, les jeunes sont aptes au vol et ils acquièrent leur indépendance alimentaire quelques jours plus tard. Ils demeurent en compagnie de leurs parents jusqu’au départ en migration (BERTHELOT & TROTIGNON in YEATMAN-BERTHELOT & JARRY, 1994).

Le succès de reproduction de la population nationale de Guifette noire est très faible. Les comptes-rendus du groupe Guifette France de 2000 à 2005 (TROTIGNON, 2005, 2006) et les suivis réalisés dans les marais Poitevins et Rochefortais depuis 1982 (SERIOT, 1996) indiquent un succès reproducteur annuel qui varie de 0 à 0,85 jeune par couple, sauf en 1991 et 1992 où les résultats ont atteint 1,6 et 2,05 jeune par couple. Excepté en 2006 (0 jeune à l’envol en raison de perturbation et prédation de la part de l’Ibis sacré Threskiornis aethiopicus), les colonies du Lac de Grand-Lieu affichaient de bons taux d’envol (1,6 jeunes à l’envol en moyenne) comparées aux autres régions, qui le plus souvent produisent peu de jeunes, voire aucun (Trotignon, in litt.).

Il apparaît que le succès reproducteur de la Guifette noire dépend fortement des habitats occupés. Le succès de reproduction observé est le plus élevé là où les colonies occupent les vallées alluviales. Il devient moyen lorsque les couples s’installent dans des marais tourbeux et relativement faible quand les colonies s’installent en prairies et landes (VAN DER WINDEN et al., 2004).

Enfin, l’insuffisance de proies (notamment petits poissons, alevins, invertébrés aquatiques) à proximité de la colonie (1 à 2 km de rayon) oblige les adultes à de très longs déplacements pour alimenter leurs poussins et influe sur le succès de reproduction.

L’âge maximum connu grâce aux données de baguage est de 21 ans (STAAV& Fransson, 2006).

Régime alimentaire

Le régime alimentaire de la Guifette noire est assez éclectique.

Bien que la nourriture de base soit composée d’insectes aquatiques et leurs larves, l’espèce consomme une grande variété d’invertébrés : insectes terrestres, vers, crustacés, mollusques et araignées.

Une part importante du régime comprend également des petits poissons, des têtards et de minuscules grenouilles. Parmi les insectes consommés, on trouve des coléoptères, diptères, éphéméroptères, odonates, papillons, neuroptères, orthoptères et hémiptères. Les poissons le plus souvent capturés sont le brochet, la perche, l’épinoche, l’anchois, le gardon et l’éperlan (GEROUDET op. cit. ; CRAMP op. cit.).

Habitats de l’Annexe I de la Directive Habitats susceptibles d’être concernés

1130 - Estuaires (Cor. 13.2 et 11.2)

1150*- Lagunes côtières (Cor. 21)

1160 - Grandes criques et baies peu profondes (Cor. 12)

1330 - Prés salés atlantiques (Glauco-puccinellietala maritimae) (Cor. 15.3)

1410 - Prés salés méditerranéens (Juncetalia maritimi) (Cor. 15.5)

3110 - Eaux oligotrophes très peu minéralisées des plaines sablonneuses (Littorelletalia uniflorae) (Cor. 22.11, 22.31)

3130 - Eaux stagnantes oligotrophes à mésotrophes avec végétation du Littorelletalia unifloare et/ou duIsoëto-Nanojuncetea(Cor. 22.11x(22.31 & 22.32))

3140 - Eaux oligo-mésotrophes calcaires avec végétation benthique à chara spp. (Cor. 22.12 x 22.44)

3150 - Lacs eutrophes naturels avec végétation du magnopotamion ou Hydrocharition (Cor. 22.13 x (22.41 et 22.421))

3160 - Lacs et mares dystrophes naturels (Cor. 22.14).

Statut juridique de l’espèce

La Guifette noire est une espèce protégée (Article 1 et 5 de l’arrêté ministériel du 17 avril 1981, modifié le 5 mars 1999), inscrite à l’Annexe I de la Directive Oiseaux et aux Annexe II des Conventions de Berne et de Bonn.

Espèce listée en catégorie B2c (populations d’Europe et ouest de l’Asie/ côte atlantique de l’Afrique) dans l’Accord sur les Oiseaux migrateurs d’Afrique-Eurasie (AEWA) : populations comptant plus de 100 000 individus et considérées comme nécessitant une attention particulière en raison d’une manifestation d’un déclin significatif à long terme.

Présence de l’espèce dans les espaces protégés

La population française de Guifette noire est constituée uniquement de quelques colonies isolées qui sont installées dans des ZPS : Marais de Rochefort, Marais poitevin, Brenne. Elle fréquente des sites intégralement protégés du type réserve naturelle ou des propriétés privées d’associations naturalistes faisant l’objet de mesures de protection spécifiques, dont les plus connues sont les réserves naturelles de St Denis du Payré (Vendée), de Grand-Lieu (Loire-Atlantique) et de Chérine en Brenne. Les espaces protégés et gérés par les associations se situent dans le marais Poitevin et le marais de Rochefort. Le site « Grande Brière, marais de Donges et du Brivet », situé dans le Parc Naturel Régional de la Brière, est également en ZPS.

Etat des populations et tendances d’évolution des effectifs

Après un déclin modéré au cours de la période 1970-1990 qui a continué en s’amplifiant entre 1990 et 2000, le statut de conservation de la Guifette noire est actuellement jugé défavorable en Europe (BIRDLIFE INTERNATIONAL, 2004). Exceptée la Russie (50 000 – 100 000 couples), où la tendance d’évolution n’est pas connue, les pays les plus densément peuplés comme l’Ukraine (12 000 – 26 000), la Biélorussie (6 000 – 22 000), la Pologne (4 000 – 5 000) et la Lituanie (2 000 – 4 000) connaissant un déclin récent – plus ou moins important. La population européenne est estimée entre 83 000 et 170 000 couples à la fin des années 1990 (BIRDLIFE INTERNATIONAL, op. cit.).

En France, l’espèce occupait au 19ème siècle presque toutes les régions, avec plusieurs milliers de couples. Au début du 20ème siècle, MAYAUD (1936), la signalait « encore commune ». La régression de la population qui avait sans doute débuté dès le début du 20ème siècle (DUBOIS et al., 2000) a été mise en évidence dans les années 60. L’estimation de 1963 montrait qu’il restait seulement 260 à 300 couples (YEATMAN, 1971). Entre 1960 et 1990, le déclin s’est poursuivi, avec pour conséquence des disparitions ou des nidifications désormais irrégulières dans plusieurs régions (Maine et Loire, Camargue, Dombes, Alsace, marais de Redon et Forez). A cette époque, l’effectif dépassait rarement plus de 110 couples (moyenne de 97 de 1982 à 1990). A partir de 1990, la population s’est accrue significativement, atteignant en moyenne 206 couples entre 1990 et 1999 (TROTIGNON, 2005). Actuellement, la Guifette noire, considérée comme espèce au statut de conservation vulnérable (MONTFORT in ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999) et à effectif réduit, affiche une tendance d’évolution démographique stable, mais son statut demeure précaire. Les derniers recensements de la période 2000-2005 indiquent des effectifs variables compris entre 190 et 400 couples (TROTIGNON,2006).

Menaces potentielles

Le très fort déclin de la population de Guifette noire en France est dû à la disparition et la dégradation des zones humides favorables à sa reproduction au cours des 50 dernières années pour la mise en culture des prairies humides et l’assèchement des marais. Le développement de la pisciculture est également évoqué pour expliquer le déclin de l'espèce en Brenne et Sologne.

La disparition des zones humides ne suffit pas à elle seule pour expliquer sa raréfaction. En effet cette espèce a des exigences très fortes pour l’installation des nids et est extrêmement sensible, au cours de la reproduction, aux variations de son habitat, ainsi qu’aux dérangements (Van der Winden, 2005, Hötker & Van der Winden, 2005). Les abandons de colonies en cours de reproduction sont très fréquents. La cause d’échec la plus fréquente est l’assèchement des prairies en cours de couvaison ou d’élevage des jeunes, ou bien au contraire de brusques augmentations de niveau d’eau entrainant la submersion des nids. Ces variations de niveau d’eau étant soit d’origine naturelle (sécheresse ou orage), soit d’origine anthropique (manipulation d’ouvrages hydrauliques).

L’autre cause d’abandon des nids fréquemment citée est le dérangement par l’homme (pêche à proximité des colonies), ou par diverses espèces introduites (Cygne tuberculé Cygnus olor, ragondins Myocastor coypus) certaines exerçant même une réelle prédation (Ibis sacré Threskiornis aethiopicus) et le piétinement par le bétail pâturant les prairies (MONTFORTin ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999). La forte turbidité des eaux, liée à la présence de ragondins et rendant la pêche difficile est identifiée comme une menace (Egreteau, comm. pers.).

Propositions de gestion

Il est indispensable de préserver les zones humides en évitant leur assèchement, leur mise en culture et leur drainage ainsi que de conserver de forts niveaux d’eau printaniers, afin que de vastes surfaces soit encore inondées durant la première quinzaine de mai, date d’installation habituelle des Guifettes noires. Ce fonctionnement hydraulique permettrait d’améliorer le frai de l’ichtyofaune, donc les ressources trophiques. Il limiterait également les risques de piétinement des nichées par le bétail en retardant sa mise à l’herbe.

Dès lors que cette modification de la gestion hydraulique est peu envisageable à court et moyen terme sur l’ensemble des zones humides, il convient de l’appliquer au moins à chaque espace protégé en zone humide potentiellement favorable (Brenne, Grand-Lieu, acquisitions du Marais Poitevin et des marais de Rochefort…).

L’objectif dans ces espaces doit être de maintenir inondés sous 10 à 20 cm d’eau les zones d’installation des guifettes durant les mois de mai, juin et durant la première quinzaine de juillet. Le niveau doit être stable, ou en diminution régulière. Pour cela deux possibilités sont envisageables :

Quand la réalimentation hydraulique n’est pas possible, ne permettant pas l’inondation permanente des zones de nidification de mai à juillet, il faut prévoir des niveaux de 40 à 50 cm d’eau au 1er mai, permettant de retarder l’assec par évapotranspiration jusqu’à la mi-juillet sous le climat des marais atlantiques. Cependant, ces forts niveaux d’eau au 1er mai ne permettent pas aux oiseaux de trouver de végétation aquatique en suffisance pour construire leur nid hors de l’eau. Il faut alors prévoir des radeaux artificiels de nidification de petites tailles (0.16 m2) à installer dans les dépressions inondées. Utilisés depuis une dizaine d’année en marais Poitevin et Charentais, ils sont très bien adoptés par les guifettes (EGRETEAU & DELECOUR, 2006). L’emploi des radeaux, sur lesquels s’installent 77% des 1000 couples nicheurs en Allemagne y constitue un moyen de maintenir la population, maintenant stable dans ce pays (Hötker & Van der Winden, 2005).

Quand la réalimentation hydraulique est possible, un niveau d’eau de 20 cm seulement doit être maintenu dès le 1er mai. Il permet l’installation des oiseaux sur la végétation naturelle. Toutefois, l’alimentation en eau doit être bien maîtrisée pour éviter tout assec ou, au contraire, de brusques remontées des niveaux risquant d’inonder les nids. L’emploi de radeaux artificiels peut être également conseillé pour éviter ce genre de problème.

Sur ces sites spécialement gérés pour la nidification de la Guifette noire, le bétail ne doit pas avoir accès aux zones de nids et doit être retiré de la prairie dès lors que les oiseaux sont installés. Quand cela s’avère impossible, la pose d’une clôture électrique est préconisée. Elle doit être montée le plus rapidement possible (< 30 minutes) afin de limiter les risques de décantonnement des oiseaux pendant l’opération.

S’il est difficile d’éviter totalement la prédation des nids, quelques techniques peuvent en réduire les risques. Il faut par exemple éviter d’installer des supports élevés (piquets) au sein des zones de nidification : si ces supports sont appréciés par les guifettes noires, ils le sont également par les corvidés. Il faut également limiter strictement la fréquentation humaine sur les quelques sites de nidification de la Guifette noire en France. Aucune intrusion n’est à tolérer sur la colonie, car elles sont sources de traces physiques et olfactives très rapidement repérées par les prédateurs terrestres. Enfin, l’observation et la surveillance de la colonie doivent être réalisées de manière assidue et régulière pour détecter et résoudre rapidement tout problème risquant de provoquer l’abandon de la colonie ; En dehors des espaces protégés, la gestion des sites de nidification consiste essentiellement en mise en place d’exclos dans le cadre de conventions de gestion passées avec les agriculteurs.

Maintenir un effort constant de piégeage du ragondin sur les sites de reproduction de la Guifette noire.

Etudes et recherches à développer

Il existe peu d’études scientifiques sur la biologie de reproduction de la Guifette noire en France, du fait de la faiblesse des effectifs nicheurs et de la très forte sensibilité au dérangement de l’espèce. Le recensement des colonies doit être poursuivi chaque année, de même que le dénombrement des jeunes volants. Ce paramètre déterminant pour l’évolution de la population, pourrait être amélioré en normalisant une méthodologie d’observation.

Des études sont en cours sur les relations entre les critères de reproduction et la hauteur d’eau, la hauteur et la densité de végétation des zones de nidification (HUNAULT, 2005). Des études sur les ressources et le comportement alimentaire seraient utiles pour mieux cerner les besoins des oiseaux durant leur reproduction et améliorer les conditions d’accueil.

Enfin des journées d’échange d’expérience en matière de gestion ou de suivis entre les membres du Groupe Guifette France seraient utiles pour améliorer la diffusion des connaissances sur cet oiseau.

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Source: Michel Caupenne, Service Etude du Patrimoine Naturel (LPO) et Christophe Egreteau, Service Espaces Naturels (LPO) - Cahiers d'habitat Oiseaux

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