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Busard des roseaux (Circus aeruginosus)
Fig. 1 - Piet Munsterman (Saxifraga)
Fig. 1

Busard des roseaux, Circus aeruginosus (Linné, 1758)

Synonyme : Busard harpaye

Classification (Ordre, Famille) : Falconiformes, Accipitridés

Description de l’espèce

Ce rapace diurne présente un fort dimorphisme sexuel, des formes élancées avec de longues ailes étroites et une queue et des tarses dénudés, également longs. La tête, petite, montre un masque facial rappelant celui des rapaces nocturnes. Le plumage « définitif » est acquis au bout de plusieurs années (3 au minimum) mais certains oiseaux ne l’acquerront jamais. Tous les individus volants ont les rémiges noires, les tarses, les doigts et la cire du bec jaune d’or, ainsi que le bec et les ongles noirs. L’iris des juvéniles est brun foncé et tend à s’éclaircir avec l’âge. Il dépasse exceptionnellement le jaune-brun chez les femelles tandis que celui des mâles atteint rapidement le jaune d’or (BAVOUX et al., 1993).

Les jeunes oiseaux sont de couleur générale brun-noir. Des taches orangées plus ou moins étendues occupent le vertex, le menton, la poitrine et les couvertures alaires. Une large bande brun-noir barre horizontalement la tête, des lores à la nuque. L’aspect des femelles adultes est identique à celui des juvéniles en plumage usé, soit avec une teinte générale brune et des plages d’aspect blanchâtre après les mues. Le mâle adulte « typique » présente un plumage en mosaïque très contrasté. Agé de 2 à 3 ans au moins, il montre en vue dorsale, un patron d’ailes tricolore avec des extrémités noires, de larges zones médianes à pointes sombres, gris-lavande, des attaches brun-rouge vif moucheté de brun très sombre. Le dessous des ailes apparaît gris très clair presque blanc. La tête et la poitrine sont de couleur beige intensément striées de brun foncé. Enfin le reste du corps et les « culottes » se présentent brun rouge uniforme. La queue est grise parfois barrée de noir plus ou moins apparent. Ce plumage évoluerait a priori sous un aspect de plus en plus contrasté au fur et à mesure que l’individu avance en âge. En fait, en Charente-Maritime, il a été montré qu’aucun mâle n’était en tous points, semblable à un autre, même d’âge identique et que pour quelques-uns d’entre eux, la confusion avec une femelle était tout à fait possible.

Le leucisme partiel et le mélanisme partiel ou total ne sont pas rares (BAVOUX et al. 1991).

La mue post-nuptiale complète des adultes a lieu d’avril-mai à octobre et parfois plus tard, La mue post-juvénile qui débute au cours du 1er hiver, implique quelques plumes de contour et parfois quelques rectrices. Le cycle de mue se calque ensuite sur celui des adultes.

En vol, souvent à très basse altitude, l’aspect est plus massif que celui des autres espèces de busards indigènes, alternant comme eux, vol battu et longs glissés planés, les ailes nettement relevées en V au dessus du corps et de la queue maintenus horizontaux. Le vol de parade du mâle s’effectue à haute altitude, suivi de piqués et «vrilles» spectaculaires. Le cérémonial du passage de proies du mâle à la femelle, typique des busards, est souvent pratiqué. Le mâle se manifeste surtout lors de ses vols acrobatiques par des cris plaintifs que l’on pourrait comparer à ceux du Vanneau huppé (Vanellus vanellus). Les femelles au nid signalent l’arrivée des mâles par de longs sifflements doux. Les deux sexes font entendre à l’occasion des strophes brèves de sons graves suivis rapidement d’alarmes (Tous les oiseaux d’Europe, J-C ROCHE, CD1 /plage 84).

Longueur totale du corps : 490 à 560cm. Poids : Mâles : (405) 530g-730g. Femelles : (620) 720g.-960 (1250) g. (Bavoux et al., 1988).

Difficultés d’identification (similitudes)

Les risques de confusion concernent les jeunes et les femelles adultes. L’Aigle botté Hieraaetus pennatus (phase sombre) de taille et de silhouette proche, sera distingué, en particulier, par la position de ses ailes qu’il tient volontiers à l’horizontale et par ses mœurs plutôt forestières. Au posé, les longs tarses de l’aigle, gainés de plumes, seront caractéristiques. Le Milan noir Milvus migrans, plus fort, dégage plus de puissance. Il s’élève davantage dans les airs, les ailes maintenues bien plus arquées vers le bas. Tenue serrée, sa queue est nettement fourchue et maniée au vol à la façon d’une godille. Très sociable il peut former fréquemment des groupes de dizaines d’individus au sol et également au vol, durant les migrations, Ce type de comportement n’est rencontré chez le Busard des roseaux que lors de curées sur des charognes et dans les dortoirs nocturnes.

Répartition géographique

Le Busard des roseaux constituerait pour certains ornithologues une seule espèce avec une large distribution géographique depuis l’ouest de l’Europe et l’Afrique du Nord, à travers l’Asie jusqu’au Japon, la Nouvelle-Guinée, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et un certain nombre d’îles des Océans Pacifique et Indien. Pour d’autres, quatre espèces n’appartiendraient pas à ce complexe taxinomique et doivent en être distinguées. L’aire de distribution détaillée de la sous-espèce nominale C. a. aeruginosus se limitera alors à l’Europe de la mer Méditerranée à l’Angleterre, au sud de la Suède et de la Finlande et vers l’est en Asie jusqu’au fleuve Iénisséi, l’Iran, le Turkestan, le sud de la Mer Noire ; celle de la forme C. a. harterti plus claire et à répartition méridionale, sera limitée au sud de l’Espagne et à l’Afrique du Nord.

Dans notre pays, deux zones de reproduction sont individualisées. Une se situe au nord d’un arc de cercle joignant la Gironde au Lyonnais et laisse de nombreuses étendues non occupées en Basse Bretagne sur les départements d’Ille-et-Vilaine et des Côtes-d’Armor, une grande partie du Maine et de la Normandie (sauf la presqu’île du Cotentin), en Lorraine au sud de Nancy et dans le Nivernais. Une deuxième entité englobe la Camargue, les étangs littoraux du golfe du Lion jusqu’aux Pyrénées-Orientales, à laquelle il faut adjoindre quelques rares nicheurs corses (Thiollay & Bretagnolle, 2004).

En France, les Busards des roseaux reproducteurs adoptent un comportement de plus en plus sédentaire au fur et à mesure que l’on se dirige vers le sud. Si seulement quelques rares individus sont observés en hivernage dans les régions septentrionales, les reproducteurs méridionaux, restés pratiquement tous sur place, voient leurs effectifs grossir avec l’arrivée d’oiseaux venus des zones septentrionales européennes.

Ecologie

Le Busard des roseaux est plutôt inféodé aux milieux humides permanents ou temporaires de basse altitude. Il fréquente de préférence les grandes phragmitaies des étangs et des lacs, tout comme celles des marais côtiers, des salines abandonnées et des rives des cours d’eau lents. A l’occasion, il s’installe aussi pour se reproduire, dans des marais parsemés de boqueteaux. Au cours des dernières décennies, la colonisation de milieux de plus en plus secs a été observée : dunes, hauts de schorres ou à vocation agricole tels prairies de fauche (Normandie), champs de céréales (Nord-Pas-de-Calais) et à un moindre degré cultures de colza (Champagne-Ardenne, Poitou-Charentes), landes humides ensemencées de Pins maritimes (Aquitaine) et fourrés denses de ronces et d’ajoncs (îles de Bretagne). En hiver et au cours de ses périples migratoires, il chasse au-dessus de tous ces milieux, mais évite toujours la haute altitude et les étendues densément boisées.

Comportement

Les Busards des roseaux migrent sur un large front, très peu dépendants de la topographie des zones parcourues et des courants aériens et franchissent les étendues maritimes (White, 1939 ; Gibb, 1951 ; Elliott & Monk, 1952 ; Moreau, 1972). Ils ne montrent pas de concentrations notables au niveau des sites européens ou africains favorables à l’observation de beaucoup d’autres grands migrateurs, tels le col d’Organbidexka (France), le détroit de Gibraltar (Sud Espagne), la localité d’Eilat (Israël) et le cap Bon (Tunisie);

La migration post-nuptiale intervient après une dispersion non-directionnelle des jeunes oiseaux qui ont acquis leur indépendance. En France, les données recueillies par Organbidexka Col Libre débutent mi-août et se terminent fin octobre, avec un pic au 20 septembre. Des individus peuvent être encore observés en mouvement jusqu’en octobre-novembre dans les régions du nord de l’Europe.

Certains oiseaux venant du nord terminent leur migration en Péninsule Ibérique et en France, mais des hivernants séjournent au nord, dès la Hollande où les femelles seraient plus nombreuses que les mâles (Zijlstra, 1987).

La principale zone d’hivernage des oiseaux de l’Ouest paléarctique (individus bagués en Allemagne et aux Pays-Bas principalement) se situe en Afrique tropicale, au nord depuis la Mauritanie à l’Ethiopie et au sud jusqu’au Zambèze (Moreau, 1972 ; Thiollay, 1989). Un poussin bagué en Hollande a été retrouvé à 7500 km de là, en Namibie, au mois de janvier suivant sa naissance. Les busards atteignent ces contrées de mi-octobre à mi-novembre et y stationnent au minimum trois mois.

Dès la fin du mois de février, la migration pré-nuptiale s’amorce (Evans & Lathbury, 1973, Christensen et al., 1981), bat son plein de la mi-mars à la mi-avril et se termine dans la deuxième quinzaine de mai en Finlande. (Haas, 1954; Hilden & Kalinainen, 1966).

Communément, les Busards des roseaux se rassemblent pour occuper des gîtes de dortoir nocturne qui sont situés préférentiellement dans des milieux ouverts humides. Cependant beaucoup (jusqu’à 15%) ont été aussi notés en zones boisées et jusqu’en pleine forêt pour quelques rares d’entre eux. La présence d’eau au pied n’est pas indispensable et des cultures annuelles telles que maïs, colza, blé, orge, moutarde, sont également occupées la nuit. S’il est fréquent que des oiseaux dorment isolément, le plus souvent, ils se regroupent (n’excèdant généralement pas 20 individus, rarement plus de 50). Aucune ségrégation sur ces sites, tant au niveau du sexe (avec une sex-ratio équilibré) qu’au niveau de l’âge (variable avec les années) n’a été mise en évidence (Bavoux et al. 1997).

Reproduction et dynamique de population

Le Busard des roseaux ne présente généralement pas une forte densité de peuplement sur ses lieux de reproduction, les couples isolés étant plutôt la règle. Il arrive cependant qu’une forte concentration de reproducteurs soit observée sur une superficie réduite. Ainsi, dans les marais de Brouage (Charente-Maritime), jusqu’à 36 nids avec pontes sur 15,6 km2 ont été comptés et une observation notée de nids avec pontes distants seulement de 13 m issus de deux couples ! Il est difficile malgré tout de parler de véritables colonies (BAVOUX et al., 1989). Les nids volumineux dans la plupart des cas, sont construits au tréfonds de la végétation, essentiellement par la femelle avec participation du mâle à l’apport des matériaux. Ils sont rarement à découvert et sont alors réduits à une simple cuvette tapissée de radicelles et fétus de paille. De façon générale, tous ces nids sont installés à proximité du sol dans un environnement inondé ou seulement humide, voire sec. Ils peuvent être exceptionnellement construits sur des buissons ou des arbrisseaux, encore plus exceptionnellement au sommet d’un arbre élevé.

En France atlantique, les pontes débutent dès la deuxième décade de mars et se poursuivent jusqu’à la troisième décade de juin (pour ces dernières, il s’agit probablement de pontes de remplacement). La majorité sont déposées entre le 10 et le 30 avril. La ponte varie de 1 à 8 œufs, les plus fréquentes en comptant 4 ou 5, la moyenne se situant entre 3,9 et 4,4 œufs. La taille des pontes diminue des plus précoces aux plus tardives. En tenant compte de toutes les pontes déposées (réussies ou non), le nombre de jeunes envolés par femelle pondeuse se situe entre 1,2 et 2,4 suivant les localités. Ce chiffre souvent faible apparaîtrait plus élevé dans les régions « nordiques ». Les poussins s’envolent à 40-45 jours. Des juvéniles émancipés à 3 semaines environ, restent longtemps sur place, jusqu’à 4 mois pour certains. Plus généralement, la dispersion définitive intervient début août lors des premiers mouvements post-nuptiaux. La maturité sexuelle peut être acquise dès la première année pour les femelles et à deux ans pour les mâles (contra sources diverses), mais nombre d’individus attendent un âge nettement plus avancé pour entamer leur première reproduction. Sur les sites, 30 % des adultes présents peuvent ne pas se reproduire. La polygamie (essentiellement polygynie) peut s’avérer localement élevée (38% dans le centre-ouest de la France !) (BAVOUX et al., 1989).

La longévité maximale observée grâce aux données de baguage est de 20 ans et 1 mois (Staav, 2001).

Régime alimentaire

Les publications y faisant référence sont très nombreuses. Le Busard des roseaux, espèce qualifiée d’« opportuniste » se nourrit uniquement de proies animales. Il chasse à l’affût posé, en vol de repérage, en vol de poursuite, ou encore à la course au sol, des proies vivantes, en pleine forme ou blessées, mais il ne délaisse pas pour autant les proies mortes, les charognes et les œufs d’autres espèces d’oiseaux. En Charente-Maritime, plus de 140 espèces-proies ont été identifiées allant de la Mante religieuse à la Chèvre domestique en passant par la Buse variable, la Cistude d’Europe, le Pélodyte ponctué et l’Anguille ! Les mammifères y étaient toujours dominants en nombre (1/3 des proies étaient des mammifères) et en biomasse, suivis par la classe des oiseaux. Les pourcentages étaient par contre inversés dans une étude similaire conduite en Camargue où les oiseaux représentaient ¾ des proies, dominant largement les autres classes (BAVOUX et al., 1990 ; THIOLLAY, 1968).

Habitats de l’annexe 1 de la Directive Habitats susceptibles d’être concernés

1310 - Végétation pionnière à Salicornia et autres espèces annuelles des zones boueuses et sableuses (Cor. 15.1)

2180 - Dunes boisées des régions atlantique, continentale et boréale (Cor. 16.29)

3150 - Lacs eutrophes naturels avec végétation du Magnopotamion ou Hydrocharition (Cor. 22.13 x (22.41 & 22.421))

4020* - Landes humides atlantiques tempérées à Erica ciliaris et Erica tetralix (Cor. 31.12)

6420 - Prairies humides méditerranéennes à grandes herbes du Molinion-Holoschoenion (Cor. 37.4)

6440 - Prairies alluviales inondables du Cnidion dubii (Cor. 37.23)

7210* - Marais calcaires à Cladium mariscus et espèces du Caricion davallianae (Cor. 53.3)

Statut juridique de l’espèce

Espèce protégée (arrêté modifié du 17/04/81), inscrite à l’Annexe I de la Directive Oiseaux, aux Annexes II des Conventions de Berne, de Bonn et de Washington et à l’annexe A du règlement CEE/CITES.

Présence de l’espèce dans les espaces protégés

Nombre d’espaces protégés intégralement ou partiellement dans notre pays abritent la nidification de l’espèce. Parmi les sites les plus importants, nous citerons les marais de la Somme (Réserve Naturelle), la baie d’Audierne (ZPS), les lacs de la forêt d’Orient (Parc Naturel Régional) et du Der-Chantecoq (Réserve Nationale de Chasse et de Faune Sauvage), les étangs de la Woèvre (Réserve de Chasse et de Faune Sauvage), la Brière (Parc Naturel Régional), l’estuaire de la Loire le lac de Grand Lieu, la baie de Bourgneuf et le marais Breton, la baie d’Yves (Réserve Naturelle de France) et les marais de Rochefort (ZPS), la réserve naturelle de Moèze-Oléron, la réserve de chasse des marais nord de la Gironde et la Camargue (ZPS, RN & R Privée).

Etat des populations et tendances d’évolution des effectifs

Son statut de conservation est jugé favorable en Europe (BIRDLIFE INTERNATIONAL, 2004).

Une grande vitalité a été constatée notamment en Grande-Bretagne et dans les Pays baltes alors que la population hollandaise doublait quasiment dans les années 1980. La politique locale d’extension des zones poldérisées en Hollande, pourrait avoir permis le renouveau de cette espèce dans les autres pays, mais les preuves font défaut. Curieusement, la fin des années 90 a vu une chute spectaculaire (jusqu’à -28,6 %) puis une situation en « dents de scie » sans que l’on puisse en connaître avec certitude les causes. La population nicheuse européenne compterait actuellement 93 000 à 140 000 couples, dont 40 000 à 60 000 en Russie (BIRDLIFE INTERNATIONAL, 2004).

L’espèce est considérée comme « à surveiller » en France (Rocamora & Yeatman-Berthelot, 1999).

D’après le 1er atlas des oiseaux nicheurs de France (YEATMAN, 1976), le Busard des roseaux était soit absent, soit représenté par de faibles effectifs, limités à certaines régions. C’est au cours des années 80 que l’espèce a connu un essor démographique extraordinaire qui l’a conduite à s’implanter dans certaines provinces (littoral de la mer du Nord et de la Manche, nord Finistère, moyenne vallée du Rhône...) et sur quelques îles du littoral atlantique (Ré, Noirmoutier, Belle-île, Ouessant) où elle n’avait jamais été signalée auparavant (Yeatman-Berthelot & Jarry, 1994). Au cours de cette période, les sites ancestraux ont vu leurs effectifs reproducteurs multipliés par 4 ou 5 (région Nord), voire 8 comme en Picardie alors que d’autres régions et des pays moins favorisés, pouvaient subir un déclin (Champagne-Ardennes : -15 %) ou encore stagner à un niveau extrêmement bas (Sologne, sillon rhodanien, Forez). Les effectifs français évalués entre 700 et1 000 couples en 1982, ont été estimés entre 1 000 et 5 000 couples en 1997 (Rocamora & Yeatman-Berthelot, 1999) et entre 1 600 et 2 200 couples en 2000/2002 (BAVOUX et al. in Thiollay & Bretagnolle, 2004), c’est le busard le plus rare dans notre pays. Son augmentation ne semble plus à l’ordre du jour.

Menaces potentielles

Une des plus grandes menaces subies par le Busard des roseaux est la régression des vastes roselières du fait de leur eutrophisation ou encore de la présence de bétail bovin et équin. Localement une présence importante de Ragondin et de Rat musqué peut faire régresser les roselières. A cette énumération s’ajoute la destruction volontaire pure et simple des milieux humides et des massifs de cet hélophyte recherché par le rapace pour déposer ses pontes. Ainsi dans le marais de Brouage en Charente-Maritime, 20 % de la superficie des roselières ont disparu ces dernières années avec dans de nombreux secteurs, une chute des effectifs du busard qui pourrait bien lui être corrélée.

La sur-fréquentation à des fins halieutiques ou encore touristiques et le dérangement en période de nidification constituent une autre menace importante, notamment dans des zones autrefois délaissées ou plus ou moins inaccessibles, (Gamauf, 1994). Le Busard des roseaux, réputé farouche, est particulièrement sensible aux dérangements de tous ordres.

La multiplication des sangliers cause localement de nombreux ravages au sein des nichées, tant sur les œufs que sur les poussins. Il a été constaté qu’un tiers des pontes disparaissait au stade des œufs, d’autres subissant une prédation partielle !

Enfin, cette espèce subit différents empoisonnements :

- Le comportement charognard du busard l’expose à se nourrir abondamment de gibier blessé ou retrouvé mort et de là à ingérer des plombs de chasse (jusqu’à 5 grains extraits d’une seule pelote de réjection !). Atteints de saturnisme aigu ou chronique, de nombreux individus succombent à plus ou moins brève échéance (Pain et al., 1993 et 1997 ; GRINNEL, 1894).

-L’utilisation de la bromadiolone et des anticoagulants dans la lutte contre les ragondins et les rats musqués présents dans les espaces occupés par le busard constitue une menace. Les busards charognards s’empoisonnent en se nourrissant des carcasses empoisonnées (Rocamora & Yeatman-Berthelot, op. cit.)

-- Une teneur importante en PCB (dérivés chimique chlorés) a été identifiée et mesurée tant dans les œufs que dans les cadavres, notamment en Charente-Maritime. Il y a là, à l’évidence, une source d’empoisonnement des adultes comme des jeunes individus et de fragilisation de la coquille de leurs œufs. (Pain et al., 1999).

Propositions de gestion

Quand on sait que la phragmitaie est « choisie » pour installer le nid dans près de 60 % des cas, la protection absolue de cette formation végétale s’impose partout où le busard nidifie ou a des velléités de s’installer. Bien que localement (Charente-Maritime), le busard puisse se satisfaire d’un simple « rideau » ou de 15 m2 à peine de roselière, la superficie minimum d’installation est plutôt de l’ordre de 10 ha de plan d’eau.

Il est donc nécessaire de conserver et de restaurer des marais et des milieux humides suffisamment étendus à tranquillité plus grande et des communautés aquatiques riches pour maintenir ses effectifs et permettre son expansion.

En période de reproduction, il convient d'identifier et de limiter l'accès et les dérangements des zones où l'espèce est installée (Rocamora & Yeatman-Berthelot, op. cit.), sachant que l’abandon pur et simple d’une nichée peut résulter du fait d’un promeneur suivant un même trajet à intervalles fréquents ou d’un pêcheur à la ligne en activité, au voisinage du site de reproduction du busard.

La multiplication d’actions d’informations soutenues auprès du plus grand nombre doit être menée pour prévenir les destructions volontaires et pour éviter l'utilisation de pesticides.

Enfin, il faut proscrire l'utilisation de la bromadiolone et de tout autre poison dans les zones de présence de l'espèce en préférant des méthodes sélectives (piégeage) et la lutte biologique (favoriser les prédateurs naturels – renards, rapaces – et changer les pratiques agricoles en limitant la taille des parcelles et en maintenant et restaurant les haies) comme pratiquée dans certains secteurs de Franche-Comté (GIRAUDOUX et al., 2002 ; INRA, 2001 ; Lidicker, 2000).

Etudes et recherches à développer

Des études de biologie et d’écologie sur un long terme sont à mettre en œuvre dans d’autres régions françaises que la Charente-Maritime où le Busard des roseaux retient l’attention de chercheurs depuis plus de 20 ans. Certes l’espèce n’est pas «oubliée» en Lorraine, en Champagne-Ardenne, en Normandie, ou encore en Aquitaine mais les moyens limités dont disposent les équipes engagées ne suffisent pas pour établir les comparaisons souhaitables particulièrement en matière de dynamique de population. Là où les individus sont totalement migrateurs, des recherches très poussées doivent être entreprises. Un point, peut-être futile mais encore peu élucidé, concerne la phénotypie des mâles. Ces populations du nord-est de notre pays se distingueraient-elles ici des populations méridionales sédentaires ? N’y n’aurait-il pas là une incidence sur les rapports inter-sexes (constitution des couples, polygamie, ségrégation sur les lieux de chasse, dans les dortoirs...) et également des conséquences sur la productivité, une mortalité différentielle ?

Enfin, il est important que l’adaptation relativement récente à des milieux « secs » de la part du Busard des roseaux, soit beaucoup mieux suivie, quantifiée, que ses causes et ses conséquences soient recherchées et élucidées.

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Source: Cahiers d'habitat Oiseaux

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