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Milan noir (Milvus migrans)
Fig. 1 - Romain Riols
Fig. 1
Fig. 2 - Source : Urcun et al., 2006
Fig. 2
Fig. 3 - Source : CORA Drôme
Fig. 3

Populations et aire de reproduction

*Mondiale
Le Milan noir a une très large répartition, couvrant l’Europe, l’Afrique, l’Asie et l’Australie. Il s’agit probablement du rapace le plus commun du monde. La sous-espèce Milvus m. migrans, qui nous intéresse ici, se reproduit dans presque toute l’Europe (absente de Grande-Bretagne, d’Islande et d’une grande partie de la Scandinavie), en Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie) et en Asie de l’Ouest (de la Turquie au Kazakhstan et au Kirghizstan). Dans le Paléarctique Occidental, l’effectif est estimé à 83000-145000 couples (Gensbol 2005), dont 30000-50000 en Russie (BirdLife International 2004).

*En France
Avec 19300-24600 couples (Thiollay & Bretagnolle 2004), la France accueille près de 30% de l’effectif nicheur européen (BirdLife International 2004). En France, l’espèce est absente du quart nord-ouest, de l’extrême sud-est et de la Corse. Les régions accueillant les plus gros effectifs sont le Rhône-Alpes, l’Auvergne, la Lorraine, la Franche-Comté, l’Aquitaine et l’Alsace (Thiollay & Bretagnolle 2004).

*Tendances
En France, l’espèce est en augmentation marquée depuis les années 1950-60 (Thiollay & Bretagnolle 2004), tendance fortement confirmée par les comptages à Organbidexka, où les effectifs migrateurs ont été multipliés par 15 entre 1981 et 2004 (Urcun 2004). En Europe, l’espèce montre ailleurs un déclin assez marqué, principalement dans ses bastions de l’est (BirdLife International 2004). Un déclin des effectifs a par ailleurs été observé au Col de l’Escrinet depuis le début des années 1990.

Aire d’hivernage

*Mondiale
La sous-espèce nominale M. m. migrans est en grande partie migratrice et hiverne principalement en Afrique subsaharienne (populations européennes) et du Moyen-Orient au Pakistan et NO de l’Inde (populations d’Asie centrale occidentale) (Fergusson-Lees & Christie 2001). Les populations françaises hiverneraient en Afrique de l’Ouest, du Ghana à la Sierra Leone et dans le delta du Niger (Dubois et al. 2001).

*En France
Quelques cas d’hivernage sont signalés presque chaque année récemment (mais déjà dans les années 1960), profitant de la source d’alimentation constituée par les décharges, généralement mêlés aux Milans royaux, notamment en Crau (Dubois et al. 2001).

MIGRATION

Type de vol
Le milan noir est avant tout un planeur, et utilise préférentiellement les ascendances thermiques pour migrer.

Groupes
Très sociable en migration, des vols dépassant 1000 individus ont déjà été observés à Organbidexka. En milieu de journée, la taille moyenne des groupes atteint les 20 individus (Urcun 2004).

Heure
Le passage a surtout lieu entre 8h et 16h à Organbidexka (plus de 80% des individus), avec un pic à 11h (Urcun 2004), alors que ce pic a lieu à 9h à la montagne de la Serre, où le passage est très faible dans l’après-midi (Menu 1993). Notons qu’à Gibraltar, le passage est au contraire plus intense en matinée et en fin de journée, lorsque les vents sont plus faibles, afin d’aider à la traversée du détroit.

Vitesse de vol
En vol plané, se déplace en moyenne à 48,5 km/h en migration, en vol mixte (battu et plané) à 44 km/h et en vol battu à 42 km/h (Bruderer & Boldt 2001).

Durée et distance
Les contrôles d’oiseaux bagués en Suisse et contrôlés en hiver au Ghana et au Sénégal indiquent des déplacements atteignant 4000 km. Un juvénile bagué en Ukraine en juin 1986 est entré en collision avec un avion 10 mois plus tard en Afrique du Sud, à 8010 km de son lieu de naissance (Oatley et al. 1998).

Âge-ratio
A Organbidexka, on observe aucune différence entre le passage postnuptial des juvéniles et celui des oiseaux plus âgés (Urcun 2004). Cette constance de l’âge ratio est confirmée sur plusieurs sites méditerranéens.

Trajet migratoire

La plupart des oiseaux d’Europe de l’Ouest gagnent l’Afrique par Gibraltar (max : 91942 individus) ; une partie des oiseaux d’Europe Centrale traverse la Méditerranée entre la Sicile (506 inds. en avril 2012 à Messine) et la Tunisie ; les oiseaux d’Europe de l’Est et de Russie passent en faible nombre par le détroit du Bosphore (environ 2700 individus) et par Borçka, de l’autre côté de la mer Noire (environ 5800). Les contrôles de Milans noirs allemands indiquent que les trois types de voies migratoires sont empruntés par les oiseaux de ce pays.

En Europe de l’Ouest, le Milan noir commence la migration postnuptiale plus tôt que les autres rapaces (mi-juillet) et débute la migration prénuptiale très tôt en saison (début février). On ignore les raisons de cette stratégie de migration, exceptionnelle pour un migrateur transsaharien. Parmi les pistes à explorer, il y a la concurrence avec le Milan d’Afrique (Milvus aegyptius), un migrateur interafricain qui était et est encore parfois considéré comme une sous-espèce du Milan noir. Dans certaines régions d’Afrique, les deux semblent s’éviter mais les migrations du Milan d’Afrique sont encore mal connues. Le Milan noir est un opportuniste dans sa nourriture, ce qui permet plus de flexibilité dans sa phénologie migratoire.

Les oiseaux d’origine française jouent probablement un rôle relativement important dans les effectifs notés sur les sites de migration en France, ce qui peut contribuer à la précocité des migrations. Il est probable que le pourcentage de Milans noirs d’origine étrangère (allemande, suisse) soit plus important au défilé de l’Ecluse (Haute-Savoie) qu’à Creste (Puy-de-Dôme) ou au col d’Organbidexka (Pyrénées-Atlantiques) mais il reste à le démontrer.

En Europe de l’Est, où l’espèce est en déclin, la stratégie de migration est différente. A Batoumi, en Géorgie, on a compté 71 108  Milans noirs en 2009, principalement en septembre, bien plus tard qu’en France.  A Eilat en Israël, le pic migratoire se situe fin mars – début avril (avec un record journalier de 20 450 inds. le 29 mars 1980). Si cette période est comparable à celle constatée au Hucel en Haute-Savoie (date médiane le 2 avril avec des migrateurs de février à début juin) il faut tenir compte de la latitude : en comparaison, le passage prénuptial à Eilat est plus tardif.

Les Milans noirs franchissent en grand nombre les Pyrénées par les parties extrêmes (plus nombreux du côté occidental qu’oriental : environ 25 000 ces dernières années depuis les cols du Transpyr), mais beaucoup traversent également la partie centrale (Urcun 2004) : jusqu’à 23 500 ont ainsi été dénombré au col du Soulor en un automne. Ils sont moins nombreux à passer en bord de Méditerranée (environ 1000 à Gruissan) à l’automne (mais au printemps, près de 3000 franchissent les falaises de Leucate).
 

Les principaux sites de migration pour le Milan noir en France

En migration postnuptiale

Le Milan noir est l’un des premiers rapaces à quitter ses territoires de nidification : les départs se font dès la dernière décade de juin et le passage culmine fin juillet / début août pour s’achever vers la mi-septembre (bien que des retardataires puissent encore s’observer dans le courant du mois d’octobre, voir tout début novembre). Le début de la migration postnuptiale est mal connu puisque la migration de retour commence avant le début des suivis protocolés (mi-juillet). On peut observer des nombres importants dès les premiers jours des suivis réguliers, par exemple 1774 inds. le 16 juillet 2012 au col d'Organbidexka. Cela indique que le début réel de la migration est plus précoce. En effet, des observations ponctuelles dans cette région situent le début de la migration vers la fin du mois de juin.

A Organbidexka, 10% des individus sont déjà passés au 26 juillet, 50% au 6 août et 90% le 19 août (Urcun 2004). Toujours sur ce site, il apparaît que sur les 20 dernières années, le passage est plus précoce de 6 jours, aussi bien pour le cap des 10% que ceux des 50% et 90% (Urcun 2004). A Fort l’Ecluse, Haute-Savoie, les oiseaux passent logiquement un peu plus tôt : selon l’année, le pic est obtenu lors de la dernière décade de juillet ou lors de la première d’août. Par contre, à la montagne de la Serre, plus au nord qu’Organbidexka le pic a lieu a la mi-août (Menu 1993).

Pour que les données soient robustes, il est recommandé de se limiter aux sites qui couvrent 95% de la période de migration. La migration du Milan noir commence dès la deuxième décade de juillet (voire plus tôt) et culmine fin juillet ou début août. Elle se termine pendant la deuxième décade d’aout. Très peu de sites commencent les suivis avant le 15 juillet. La migration du Milan noir peut  déjà être importante à la mi-juillet, comme l’atteste l’observation de 380 inds. à Creste le 16 juillet 2011 (premier jour du suivi).

Le site avec le plus de données pendant la fenêtre de migration du Milan noir est le col d’Organbidexka. Le total est de 431 727 Milans noir en 1981-2011 (sans les années 1991 et 1995), en moyenne 14887 migrateurs par saison. Le minimum est 1406 individus en 1981 et le maximum 41400 en 2010. Dans les Pyrénées, l’augmentation de cette espèce est exponentielle. Il est probable que le Milan noir bénéficie du réchauffement climatique, mais aussi des dépôts d’ordures. Au col de Lizarrieta et à la redoute de Lindux, le suivi de la migration commence trop tard pour que les données soient représentatives pour cette espèce. La date médiane au col d’Organbidexka est le 5 août (1981-2011).

Au défilé de l’Ecluse (Haute-Savoie) on confirme l’augmentation exponentielle notée aussi dans les Pyrénées, de 1771 individus en 1978 à 11413 en 2011. La moyenne au défilé de l’Ecluse est de 4202 individus par saison (n = 142 873 en 1978-2011).  La différence entre les effectifs au défilé de l’Ecluse et au col d’Organbidexka est importante : en moyenne, ceux d’Organbidexka sont 3,5 fois supérieurs. Ensuite, les Milans noirs s'orientent vers le sud-ouest: il sont peu nombreux à passer au fort de la Revère (Alpes-Maritimes).

Le troisième site français à atteindre la barre symbolique des 10 000 Milans noir en France après le  col d’Organbidexka et le défilé de l’Ecluse est Creste (Auvergne). Le maximum saisonnier pour Creste est de 10204 individus en 2011.

En migration postnuptiale, le Milan noir traverse les Pyrénées principalement en Aquitaine. En migration active, l’espèce est moins abondante dans les Pyrénées orientales, comme le démontre l’année la mieux suivie à la Cerdagne-Eyne, 2010, avec 1408 Milans noirs (date moyenne :  16 août). Au roc de Conilhac, Gruissan-Narbonne, les maxima saisonniers sont 6428 inds. en 2010 et 5664 en 2011. Aux Conches (Ain) on a noté un maximum saisonnier de 3376 Milans noirs en 2010.

En migration prénuptiale

On constate les premiers retours dans les tout premiers jours de février. On note d’ailleurs une augmentation des cas d’hivernage en France.  La plupart des immatures (2ème année calendaire) bagués en Europe centrale passent l’été en Afrique du Nord et en Europe du Sud. Les immatures qui remontent, restent principalement en Espagne.

Sur la côte languedocienne, le passage concerne plusieurs milliers d’individus (3935 à Leucate en 1983). Comme Leucate n’est plus suivi de façon systématique depuis 1989, il est probable que les nombres sont encore plus importants de nos jours. A l’étang de l’Ayrolle, Gruissan, on a noté un maximum de 1806 exemplaires en 2009 et à Canet-Saint-Nazaire, on a observé 1329 individus en 2012.

Sur le littoral atlantique on a noté un maximum de 2239 Milans noirs à la pointe de Grave en 2011.

Au Hucel, on a comptabilisé 19 838 individus en 12 ans (1998-2011, sans 2000 et 2001), en moyenne 1653 individus par an. Le maximum est atteint en 2011 (2747 inds.) tandis que le minimum a été enregistré en 2002 (1139 inds.).Pierre-Aiguille (Drôme) détient le record saisonnier en migration prénuptiale (5444 en 2009). Le col de l’Escrinet est également un site d’importance nationale en migration prénuptiale : maximum 3086 en 1992.   Dans l’ensemble, les sites de la vallée du Rhône sont importants pour la migration printanière du Milan noir. Pour terminer, voici deux maxima saisonniers en Ardèche : 2100 à Meysse (en 2011) et 1771 à Andance (en 2005).

Record journalier
A Gibraltar, le record journalier s’établit à plus de 13000 individus (Fergusson-Lees & Christie 2001) !
Généralement, à Organbidexka (max. 5068 le 18 août 1988), près de la moitié des oiseaux de l’automne passent en trois jours, le pic-jour concernant 22% des oiseaux de l’automne (Urcun 2004). Ce chiffre est à rapprocher de celui d’Eilat, Israël, où le meilleur passage journaliser voit en général passer 20% des oiseaux de l’automne (mais 35% pour le pic-jour du printemps) (Leshem & Yom-Tov 1996).

Statut juridique

Espèce protégée, inscrite sur l’annexe 1 de la directive Oiseaux.
UICN : Préoccupation mineure (LC).

Menaces liées à l’homme

Electrocution
Empoisonnements

Bibliographie

BirdLife International. 2004. Birds in Europe : population estimates, trends and conservation status. Cambridge, UK : BirdLife International.
Bruderer, B. & Boldt, A. 2001. Flight characteristics of birds : 1. radar measurements of speeds. Ibis 143: 178-204.
Dubois, P.-J., Le Maréchal, P., Olioso, G. & Yésou, P. (2001). Inventaire des Oiseaux de France. Nathan, Paris.
Ferguson-Lees, J. & Christie, D.A. 2001. Raptors of the world. Helm. London.
Gensbol, B. 2005. Guide des rapaces diurnes d’Europe, Afrique du Nord et Moyen Orient. Delachaux et Niestlé, Paris.
Menu, S. 1993. La migration postnuptiale des oiseaux à la montagne de la Serre : 1986-1992. LPO Auvergne.
Oatley, TB, Oschadleus, HD, Navarro, RA & Underhill, LG. 1998. Review of Ring Recoveries of Birds of Prey in Southern Africa: 1948-1998. Johannesburg: Endangered Wildlife Trust.
Thiollay, J.M. & Bretagnolle, V. (2004).- Rapaces nicheurs de France, Distribution, effectifs et conservation. Delachaux et Nieslé, Paris, 176 p.


Milan noir, Milvus migrans (Boddaert, 1783)

Classification (Ordre, Famille) : Accipitriformes, Accipitridés

Description de l’espèce

D’une taille intermédiaire entre la Buse variable et le Milan royal, le Milan noir se caractérise par sa queue faiblement échancrée et sa coloration très sombre. Il ne paraît noir que lorsqu’on l’observe de loin, car son plumage est, en fait, brun foncé uniforme sur le dessus du corps, avec une zone beige diffuse sur les primaires et brun-roux strié de noir dessous. Dans de bonnes conditions d’observation, une zone pâle se distingue sous l’aile. La tête est d’un blanc brunâtre strié de noir. Les jeunes ont le corps plus clair ; ce n’est qu’à deux ans qu’ils acquièrent totalement leur plumage d’adulte. Il n’y a pas de dimorphisme sexuel apparent.

La mue post nuptiale des adultes, complète, débute en mai-juin et se termine dans les quartiers d’hiver.

Le cri habituel, un sifflement clair et tremblé, ressemble à un hennissement, souvent plus rauque que celui du Milan royal (Tous les oiseaux d’Europe, J-C ROCHE, CD 1/plage 79).

Longueur totale du corps : 50 à 60 cm. Poids : 650 à 1000 g (LALEURE in STRENNA, 2000).

Difficultés d’identification (similitudes)

Le Milan noir se distingue du Milan royal par sa teinte plus sombre, sa taille un peu moindre, ses ailes et sa queue proportionnellement plus courtes, le bout de ses ailes plus larges, sa queue moins échancrée et le dessus de sa queue gris brunâtre (jamais roussâtre). Lorsque l’échancrure de la queue n’est pas sensible (ou manque du fait de la mue, de l’usure ou du déploiement), une confusion est possible avec la forme sombre de l’Aigle botté, mais celui-ci a les ailes moins coudées et la queue arrondie. Le Busard des roseaux a l’aile bien moins digitée, pas de base claire au dessous des rémiges primaires et, de face, a le bras levé et la main plus plane (ses ailes ne sont pas en cloche avec la main abaissée).

Répartition géographique

Espèce de l’Ancien Monde, le Milan noir niche dans toute l’Europe à l’exception des îles Britanniques, du Danemark, de la Norvège et des îles de la Méditerranée. Ses quartiers d’hiver se situent en Afrique tropicale, du Sénégal au Kenya.

En France, il est absent en tant que nicheur dans le Nord-Ouest, dans quelques régions circum-méditerranéennes et alpines et de la Corse (Thiollay & Bretagnolle, 2004). On le rencontre également en période de migration dans la plupart des régions, le couloir rhodanien étant un axe de passage important. Les derniers migrateurs sont observés en octobre. Le transit des migrateurs européens est très important sur notre territoire et concerne les oiseaux originaires de France, mais aussi la plupart de ceux nichant en Suisse et en Allemagne (SCHIFFERLI, 1967). Les cols pyrénéens voient ainsi passer chaque année plusieurs dizaines de milliers d’individus.

L’hivernage en France de ce migrateur trans-saharien est anecdotique, bien qu’apparemment devenu régulier depuis une trentaine d’années (SAGOT, in YEATMAN-BERTHELOT, 1991). Quelques individus sont maintenant vus de façon régulière en France au sein de dortoirs de Milans royaux.

Ecologie

Le Milan noir fréquente les grandes vallées alluviales, près de lacs ou de grands étangs, pour autant qu’il y trouve un gros arbre pour construire son aire (DOUMERET, in YEATMAN-BERTHELOT & JARRY, 1994). Il fréquente également volontiers les alignements d’arbres surplombant ces étendues d’eau, au sein de Frênes, de Peupliers ou de Chênes principalement. En plaine de Saône, la présence du Milan noir est effective sur 70% des étangs dont la superficie est comprise entre dix à vingt hectares, tandis qu’elle n’est plus que de 30% si ces étangs ont une taille inférieure à 10 hectares (ROCHE, 1982).

Les zones de prairies humides et de plaines agricoles sont maintenant occupées de façon régulière par l’espèce (GODS, 1995) et on note une attirance pour nicher en périphérie de décharges d’ordures ménagères (GSO, 1991). L’espèce peut également nicher parfois dans des falaises boisées, comme celles du Salève en pays genevois ou dans les Pyrénées-Atlantiques (DOUMERET, in YEATMAN-BERTHELOT & JARRY, 1994). Il ne pénètre que peu les grands massifs forestiers, sauf si ceux-ci bordent un vaste plan d’eau (Champagne, Plaine de Saône).

Comportement

Comme l’indique son nom latin, le Milan noir est migrateur; il quitte l’Europe dès fin juillet pour rejoindre ses quartiers d’hiver.

Les premiers oiseaux de retour sont notés dès février, mais la plupart regagnent leur territoire de nidification de mars à mai (DOUMERET, in YEATMAN-BERTHELOT & JARRY, 1994).

L’abondance de proies peut amener cette espèce sociable à nicher en colonies ou entraîner des concentrations spectaculaires sur les sites d’alimentation (GNFC, 1984; COGard, 1993). Dans les forêts alluviales à bois durs du Val de Saône, il est possible d’avoir jusqu’à 4 à 5 nids dans la même parcelle forestière, et sur un linéaire de 15 kilomètres de rivière, une quinzaine de couples a été recensé (GODREAU, 1994). A l’aplomb d’étangs forestiers, 6 à 10 nids contigus peuvent être notés dans cette même région tout comme en bordure des étangs forestiers lorrains (Meuse et Moselle).

Les regroupements de plusieurs dizaines d’individus sur les dépôts d’ordures ménagères en période de reproduction concerne des oiseaux immatures (COCA, 1991 ; DOUMERET, in YEATMAN-BERTHELOT & JARRY, op. cit.), mais en juillet-août, adultes et jeunes s’y retrouvent. En plaine de Saône, après la première coupe de foins dans les prairies inondables, ces regroupements peuvent atteindre 60 à 80 individus.

Au moment de la migration pré ou postnuptiale, des regroupements spectaculaires sont également notés au sein de dortoirs pouvant atteindre plusieurs centaines d’individus notamment dans les ripisylves des grands fleuves (Allier…).

Reproduction et dynamique de population

Le Milan noir commence à se reproduire à l’âge de deux ou trois ans. Il semble que les couples soient fidèles et qu’ils gardent généralement le même territoire d’une année sur l’autre. Lors des parades nuptiales, les deux partenaires volent ensemble en décrivant des orbes, se tournant d’un côté et de l’autre et, parfois, esquissent des attaques mutuelles. L’aire, qu’il s’agisse de celle construite l’année précédente ou d’un ancien nid de corneille, voire de rapace, est située généralement en lisière de forêt, souvent près de l’eau à proximité des grands fleuves ou de grands lacs, en périphérie d’étangs forestiers et en forêts rivulaires. Elle se trouve plus rarement sur des arbres isolés et quelquefois sur un pylône. Elle est construite par le couple à une hauteur généralement comprise entre 8 et 15 mètres et presque toujours garnie de détritus de toutes sortes : papiers, chiffons, plastique...

La ponte de 2 ou 3 œufs (jusqu’à 4), a lieu essentiellement pendant la seconde quinzaine d’avril ou début mai. La taille des œufs est très variable, ce qui entraîne des différences dans la durée de l’incubation, 32 à 33 jours en moyenne. Le mâle peut couver pendant de courtes périodes. L’envol des jeunes a lieu à l’âge de 42 à 50 jours ; ils restent encore dépendants des parents pendant 15 à 30 jours. La réussite de la reproduction est en partie fonction de la météo, avec une forte mortalité lors des printemps froids et pluvieux (LALEURE in STRENNA, op. cit.).

Les jeunes et les individus non reproducteurs peuvent passer la nuit en dortoir.

La longévité maximale observée grâce aux données de baguage est de 23 ans (Staav, 2001).

Régime alimentaire

Charognard, le Milan noir ramasse volontiers les poissons morts à la surface des eaux libres et ne dédaigne pas les déchets, mais il peut aussi capturer les vertébrés et les invertébrés d’un poids inférieur à 600 grammes (DELIBES CASTRO, 1975). Dans les prairies exploitées au moment de la fauche, sa proie principale est alors le Campagnol des champs.

Habitats de l’annexe I de la Directive Habitats susceptibles d’être concernés

2180 - Dunes boisées des régions atlantique, continentale et boréale (Cor. 16.29)

3150 - Lacs eutrophes naturels avec végétation du Magnopotamion ou Hydrocharition (Cor. 22.13 x (22.41 & 22.421))

4020* - Landes humides atlantiques tempérées à Erica ciliaris et Erica tetralix (Cor. 31.12)

6410 - Prairies à Molinia sur sols calcaires, tourbeux ou argilo-limoneux (Molinion-caeruleae) (Cor. 37.31)

6440 - Prairies alluviales inondables du Cnidion dubii (Cor. 37.23)

6510 - Prairies maigres de fauche de basse altitude (Alopecurus pratensis, Sanguisorba officinalis) (Cor. 38.2)

6520 - Les prairies de fauche de montagne (Cor. 38.3)

91EO *- Forêts alluviales à Alnus glutinosa et Fraxinus excelsior, peupleraies à Peuplier noir, Ormaies-frênaies (Cor. 44-3 ; 44-2 ; 44-13)

91F0 - Forêts mixtes à Quercus robur, Ulmus laevis, Ulmus minor, Fraxinus excelsior ou Fraxinus angustifolia, riveraines des grands fleuves : chênaies pédonculées-ormaies du Rhin, du Rhône et de la Saône, peupleraies blanches postpionnières à Frêne commun du ried rhénan (Cor. 44-4)

Statut juridique de l’espèce

Espèce protégée en France (arrêté modifié du 17/04/81), inscrite à l’Annexe I de la Directive Oiseaux, Annexe II de la Convention de Berne, Annexe II de la Convention de Bonn ; Annexe II de la Convention de Washington (CITES) ;

Présence de l’espèce dans les espaces protégés

Aucun espace protégé ne concerne directement cette espèce. Cependant, certaines réserves naturelles de création récente recèlent des populations importantes de Milan noir comme la RNN de la Forêt d’Orient située au cœur du Parc naturel régional de la Forêt d’Orient (Aube) ou la RNN du delta de la Sauer le long du Rhin (Bas-Rhin). Le Milan noir est bien représenté dans les ZPS, notamment la vallée de la Loire, les Barthes de l’Adour, les marais de Rochefort, de la Seudre et de Brouage, ainsi que le Forez et la Camargue.

Etat des populations et tendances d’évolution des effectifs

Son statut de conservation est jugé vulnérable en Europe (BIRDLIFE INTERNATIONAL, 2004). Les effectifs nicheurs sont relativement faibles, inférieurs à 100 000 couples et les populations nicheuses d’Europe ont subi un large déclin entre les années 1970 et 1990 puis entre les années 1990 et 2000, à l’exception de certains pays dont la France.

En France, après une nette progression observée dès le début des années 1970, l’effectif national atteignait 6 000 à 8 000 couples nicheurs une dizaine d’années plus tard (FIR-UNAO, 1984). L’enquête réalisée en 2000 (KABOUCHE in Thiollay & Bretagnolle, 2004), bien plus précise que la précédente, indique une population de l’ordre de 20 000 à 24 000 couples, principalement installés dans les vallées alluviales du Rhône, de la Loire, de la Garonne, de la Dordogne ou du Rhin.

Cet effectif représente environ 8 % de la population européenne, mais plus de 50% de celle de l’Europe de l’ouest.

La tendance actuelle d’évolution des effectifs semble montrer une augmentation de l’espèce dans les zones de fortes colonies (Auvergne, Rhône-Alpes, Aquitaine, ..) et où les ripisylves sont en bon état, avec l’élargissement de son aire de répartition dans le Midi de la France. Dans le même temps, certains secteurs enregistrent actuellement une forte diminution des effectifs (Lorraine, Champagne humide, Jura), sans que les raisons soient clairement identifiées (KABOUCHE in THIOLLAY & BRETAGNOLLE, 2004).

Contrairement au Milan royal, dont les effectifs sont en chute libre, le Milan noir ne semble pas pour l’heure une espèce menacée en France, mais il est classé "à surveiller" (DOUMERET, in ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999).

Menaces potentielles

A ce jour, la menace principale semble être une forte dégradation, voire une régression de ses milieux de prédilection, principalement les zones humides dont il dépend partiellement pour sa reproduction.

Par ailleurs, l’intoxication par appâts empoisonnés destinés aux micromammifères et son régime charognard l’amenant à fréquenter les routes, peuvent être des causes supplémentaires de mortalité. Enfin, les cas d’électrocution sur les transformateurs aériens des lignes à moyenne tension (SERIOT & ROCAMORA, 1992a et b) sont encore assez nombreux.

Quelques cas de destruction des supports des aires de reproduction ont été rapportés.

Bien que nécessaire sur le plan sanitaire et environnemental, la fermeture des dépôts d'ordures ménagères peut constituer une source alimentaire en moins.

Propositions de gestion

Ce rapace s’accommode de l’activité humaine, pour autant que ses habitats ne soient pas détruits ou profondément modifiés. Ainsi, les zones humides ne devraient plus être drainées et transformées en zones de cultures céréalières. Pour cela, les programmes agri-environnementaux favorisant l’élevage extensif ou d’autres utilisations traditionnelles des zones humides doivent être maintenus (DOUMERET, in ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999). En outre, il convient de maintenir ou restaurer les ripisylves.

Lors des coupes forestières ou de l’abattage de haies, le maintien de quelques grands arbres, en particulier ceux qui portent d’anciennes aires, suffit à lui permettre de nicher (von KALITSCH, 1940). Les bosquets où le Milan noir se reproduit en colonies devraient, par ailleurs, être protégés.

L’interdiction du tir des aires lors des battues aux Corvidés doit être maintenue et le non-respect de cette mesure sévèrement réprimé (DOUMERET, in ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999).

Il est nécessaire de proscrire l'utilisation des appâts empoisonnés, notamment la bromadiolone, en préférant des méthodes sélectives (piégeage) et la lutte biologique (favoriser les prédateurs naturels – renards, rapaces – et changer les pratiques agricoles en limitant la tailles des parcelles et en maintenant et restaurant les haies) comme pratiquée dans certains secteurs de Franche-Comté (GIRAUDOUX et al., 2002 ; INRA, 2001 ; Lidicker, 2000).

Un meilleur contrôle de l’utilisation d’appâts empoisonnés est également nécessaire pour éviter les accidents. La neutralisation des installations électriques aériennes dangereuses ou l’enterrement des lignes du réseau aérien à moyenne tension doivent être recherchés dans les habitats de prédilection du Milan noir (DOUMERET, in ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999), notamment dans les ZPS, où les densités de l’espèce sont fortes, et à proximité des colonies et des sites d’alimentation (étangs, cours d’eau…).

Etudes et recherches à développer

Il serait important de mettre en place un suivi régulier de l’espèce, par exemple pour déterminer s’il y a régression ou simple redistribution des effectifs, en entreprenant le recensement des couples nicheurs sur de vastes surfaces, ou en utilisant une méthode basée sur des Indices Kilométriques d’Abondance (DOUMERET, in ROCAMORA & YEATMAN-BERTHELOT, 1999), ou en mettant en place le suivi temporaire des rapaces, tel que préconisé à l’issue de l’enquête nationale de 2000-2002 (Thiollay & Bretagnolle, 2004).

Des travaux sont en cours sur l’impact des éoliennes en Camargue : des milans noirs morts sont régulièrement trouvés au pied de lignes d’éoliennes, victimes lors de la recherche de cadavres d’oiseaux morts avant eux.

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Source: Cahiers d'habitat Oiseaux

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