fr
de
it
en
es
nl
 Visiteur Anonyme 
Accueil
Base de données
 - 
Accueil base de données
 - 
Notre charte
  Les observations
    - 
Synthèse annuelle
  Les galeries
    - 
Toutes les photos
  Statistiques d'utilisation
Qu'est-ce que la migration ?
Les sites de migration
Connaître les migrateurs
Ressources et liens
La mission migration
Les partenaires

Migrations invasives ou irruptions

Certaines espèces sont sujettes, de manière périodique, à des mouvements de grande ampleur, impliquant des dizaines de milliers d’individus, d’ordinaire plutôt sédentaires, ou migrant sur de courtes distances. Ayant principalement pour cause la raréfaction de ressources alimentaires, on nomme ce type de mouvement irruption. 

Il ne s’agit pas de vraies migrations, n’étant pas saisonnières, mais d’irruptions.

Certaines années, à partir de l’automne, un peu partout en France, et sur les sites de suivi migratoire en particulier, on observe, pour une espèce donnée, des effectifs très largement supérieurs (plusieurs dizaines ou centaines de fois) à ceux habituellement signalés.

Il s’agit d’espèces ou de populations forestières originaires des régions nordiques et orientales (Scandinavie, Russie, Sibérie).

Une combinaison de facteurs peuvent être à l’origine de tels déplacements invasifs : une série d’années très favorables à la reproduction de l’espèce (bonnes fructifications, météorologie favorable), suivies par une raréfaction des ressources alimentaires sur les lieux de reproduction, poussent alors des oiseaux d’ordinaire relativement sédentaires vers l’ouest et le sud à la recherche de nouvelles sources de nourriture.

Parmi les espèces et populations des pays nordiques susceptibles d’apparaître en nombre chez nous lors de telles invasions, on peut citer le Jaseur boréal, le Sizerin flammé, les Mésanges charbonnières, bleues et noires, le Pic épeiche, le Cassenoix moucheté, le Geai des chênes, la Sittelle torchepot, le Bouvreuil pivoine (etc.). De grandes invasions, ou irruptions, sont généralement très rares (tous les 40-50 ans pour la Jaseur boréal, peut-être tous les 8-10 ans pour la Mésange noire), mais de petites irruptions périodiques sont plus fréquentes.

On peut faire la distinction entre ces espèces irruptives et les espèces nomades : les premières ont une aire de reproduction relativement stable, mais peuvent apparaître en nombre extrêmement important en automne loin de leur aire normale. Les seconds sont sujets à des mouvements irruptifs, mais n’ont pas de zone de reproduction stable et bien définie ; c’est le cas du Bec-croisé des sapins.

Migrations à contre-sens

De manière classique, après s’être reproduits, les migrateurs s’en vont vers le sud, et une fois l’hiver passé, remontent vers le Nord. Cependant, certains effectuent des mouvements inverses, généralement de manière temporaire : des canards et des goélands vont remonter muer plus au nord après la nidification, et les oiseaux bloqués ou déviés par le mauvais temps peuvent faire demi-tour lors de leur trajet migratoire.

Elles sont de trois ordres.

  1. La migration de mue

    Tadorne de Belon F. CahezElle concerne certaines espèces qui, après la nidification, migrent dans un premier temps pour muer sur des sites très riches en ressources alimentaires, souvent situés plus au nord que l’aire de nidification habituelle. L’exemple le plus célèbre est le Tadorne de Belon, dont une grande partie des populations d’Europe occidentale et méridionale convergent vers la mer des Wadden (Pays-Bas) pour y muer, profitant de l’abondance d’un petit gastéropode, Hydrobia ulvae. D’autres oiseaux d’eau effectuent de tels déplacements vers des sites de mue (les Grèbes esclavons se rassemblent par centaines de milliers pour muer sur le Grand Lac Salé en Utah, Etats-Unis ; les Harles bièvres en Norvège).

    Certains puffins sont également connus pour de telles migrations. Ainsi, les Puffins majeurs, après s’être reproduits dans l’Atlantique Sud durant l’été austral, migrent vers le Nord jusqu’au sud du Groenland pour y muer en juillet et août.

    Un autre exemple de migration inversée de plus en plus remarquée par les ornithologues européens est celle du Goéland leucophée, suite à l’accroissement important de ses populations. On voit ainsi apparaître l’espèce (principalement les immatures) par centaines dans le nord et l’ouest de la France (et jusqu’aux Pays-Bas, Allemagne), dès le mois de juin mais surtout en septembre et octobre, avant de redescendre vers le sud en novembre. Les lectures de bagues attestent d’une origine méditerranéenne pour la plupart des oiseaux.

  2. La rétromigration.

    Ce type de migration est un phénomène bien connu des observateurs sur les sites de suivi de la migration. Il a été remarqué, grâce au baguage automnal à Falsterbo, en Suède (Akesson et al. 1996), qu’arrivés face à la mer, environ la moitié des oiseaux ayant fait l’objet de contrôles ou de reprises (c'est-à-dire ayant été recapturés) ou trouvés morts ailleurs, avaient fait demi-tour (généralement à des distances inférieures à 100 km, mais parfois jusqu’à 500 km). Tous les types de migrateurs sont concernés par ce phénomène, mais plus particulièrement les migrateurs courte et moyenne distance. On constate en outre que les individus les plus concernés par cette rétromigration étaient ceux disposant des réserves de graisse les plus faibles. Pas prêts à passer une barrière, et face à une compétition très élevée pour la nourriture (les migrateurs se concentrent le long des côtes), la migration à rebours pourrait être une stratégie évolutive pour faire le plein en réserves énergétiques.

    La rétromigration peut être particulièrement spectaculaire durant la migration postnuptiale (le plus souvent en octobre), lors de conditions météorologiques particulières : par fort vent contraire, au lieu de descendre vers le sud, les passereaux migrateurs (P. ex. Pinson des arbres, Pipit farlouse), remontent vers le nord ou l’est, probablement poussés par le besoin instinctif d’avancer coûte que coûte, même si la seule direction qui leur est physiquement possible d’emprunter est erronée. Ces phénomènes peuvent durer un ou deux jours de suite, rarement plus.

  3. Les mouvements de fuite

    Oies cendrées F. CrosetOn observe également des mouvements de fuite face à des conditions météorologiques défavorables. Cela rejoint en partie la catégorie précédente.

    C’est souvent le cas lors du passage prénuptial : des oiseaux au calendrier de migration précoce (par exemple le Vanneau huppé, l’Oie cendrée) sont parfois obligés de rebrousser chemin face à l’apparition d’une vague de froid tardive, et ainsi de reprendre leur migration en sens inverse jusqu’à ce que les conditions redeviennent favorables.

    Au printemps, il est fréquent que les passereaux avancent en suivant un front chaud, puis rebroussent un petit peu chemin face à un front froid, ré-avancent au front chaud suivant, etc. : on peut observer une succession de phases de type « trois pas en avant, un pas en arrière ».

    On peut également citer le cas des Martinets noirs, qui face à un large front orageux, peuvent s’échapper jusqu’à 1000-2000 km au sud (même s’ils sont déjà en train de nicher, ils abandonnent ainsi leur colonie quelques jours).

De nouvelles routes migratoires ?

Certains oiseaux, au lieu de partir plutôt vers l’est, vont gagner l’ouest. S’agit-il d’erreurs de navigation, de stratégies destinées à explorer de nouvelles routes migratoires ?

Toujours est-il que ce phénomène explique en grande partie l’apparition d’oiseaux égarés dans nos pays, très recherchés par les ornithologues de terrain !

On observe chez de nombreuses espèces qu’une très faible part des individus emprunte régulièrement un trajet migratoire symétriquement (parfois, diamétralement) opposé à celui emprunté traditionnellement par l’espèce. Par exemple, un faible pourcentage (entre 1 et 5%) des passereaux scandinaves migrant habituellement vers le sud-est partira vers l’Afrique de l’Ouest par le sud-ouest au lieu de gagner l’Afrique de l’Est. Il est probable que, souvent, de telles modifications soient le fruit d’initiatives individuelles : de nouveaux trajets migratoires sont explorés.

Il a été montré (Sutherland 1998) que la probabilité de modification des routes migratoires est plus élevée chez les espèces dont les juvéniles accompagnent les adultes lors de la migration. Le programme génétique migratoire constitue dans certains cas une contrainte évolutive empêchant les jeunes oiseaux migrant seuls d’emprunter un trajet autre que celui habituellement pris par l’espèce, mais l’apprentissage entre les générations accroît la flexibilité du choix des routes migratoires.

A terme, de nouvelles voies migratoires peuvent ainsi être créées et empruntées par une partie conséquente de la population si les individus parviennent à regagner leurs sites de nidification avec un taux de survie supérieur à celui des populations empruntant la voie habituelle.

Ce fut le cas des Fauvettes à tête noire d’Europe Centrale qui hivernent désormais en Grande-Bretagne, après avoir modifié d’environ 30° leur angle de migration : une quantité suffisante de nourriture étant disponible à une distance moindre que les anciens sites d’hivernage, les individus empruntant cette nouvelle voie sont sélectionnés.

Ces modifications de direction migratoire peuvent également se justifier par un appauvrissement des sites d’hivernage traditionnels. Par exemple, la dégradation de certains sites d’hivernage d’Oies rieuses a entraîné un glissement d’une partie des hivernants d’Europe Centrale vers les Pays-Bas et l’Allemagne de l’Ouest, et donc une modification des voies migratoires.

La recherche d’oiseaux égarés, provenant par exemple de Sibérie ou d’Amérique, passionne un grand nombre d’ornithologues européens, y compris en France. Dans bien des cas, l’apparition de telles espèces est directement reliée à la météorologie : déportées par une tempête traversant rapidement l’Atlantique d’Est en Ouest, poussées par les puissants anticyclones sibériens de l’automne…

Il est possible qu’une partie de ces oiseaux déportés par les vents dans une direction inverse à celle qu’ils devaient emprunter soit des oiseaux ayant entamé une courte migration à rebours (ou rétromigration : voir le chapitre consacré à ce sujet), qui se sont alors laissés entraîner par les vents.

On suppose, pour la plupart des passereaux sibériens venant de très loin et dont l’apparition est assez régulière, qu’il s’agit d’individus à compas magnétique défectueux, car ils migrent dans la direction opposée à celle habituellement choisie par l’espèce. Mais il se pourrait aussi, là encore, qu’il s’agisse d’oiseaux prospectant vers de nouveaux quartiers d’hivernage. On peut ainsi citer les apparitions automnales célèbres des Pouillot à grands sourcils et de Pallas, arrivant d’Asie centrale sur les côtes européennes au lieu de leurs quartiers hivernaux sud-asiatiques.

On a aussi évoqué la présence d’anomalies magnétiques dans certaines régions asiatiques ; des expériences menées sur les Gobemouches noirs supportent cette hypothèse.

Visionature
VisioNature est un outil développé avec la collaboration du réseau LPO. Grâce aux technologies Internet, débutants, amateurs et professionnels naturalistes, peuvent partager en temps réel leur découverte et ainsi améliorer la connaissance et la protection de la faune

Biolovision Sàrl (Switzerland), 2003-2024